Entrepreneur malgré soi - Episode 1 : L'entreprise familiale héritée

Entreprendre, diriger une entreprise peut être une aventure formidable. Pourtant, certains subissent et n’ont pas vraiment choisi cette place.

Dans ce premier épisode, je vous parle de l’entreprise familiale héritée.

Ce qui peut ressembler à un cadeau pour certains, est un fardeau pour d’autres.

Avoir des ascendants entrepreneurs ne fait pas de soi-même un entrepreneur. On peut imaginer qu’avec la transmission de l’entreprise familiale, il y aura aussi une transmission de l’expérience, du savoir-faire. Mais ce n’est pas toujours vrai. Et surtout, cela ne suffit pas.

Être à sa place

Dans le meilleur des cas, l’héritier saura développer l’entreprise en harmonie avec les évolutions techniques, économiques, socio-culturelles parce que lui-même se sentira à sa place dans cette position de dirigeant et aura naturellement la posture d’un entrepreneur. Curieux et attentif aux opportunités qu’offre l’avancement du monde.

Pas l’âme d’un entrepreneur

Dans une autre situation, l’héritier aura une stature de dirigeant héritée, mais pas l’âme d’un entrepreneur. Il s’attachera à maintenir la stabilité de l’entreprise du mieux qu’il pourra, en suivant ce qui a toujours été fait. Ce qui sera relativement simple par temps calme, plus compliqué au gré des soubresauts dont l’économie a l’habitude.

Flamber ou subir

Dans le pire des cas, il n’aura hérité ni du gène de l’entrepreneur ni de celui du dirigeant, seulement de l’entreprise. Dans cette situation, certains flamberont et dilapideront ce que la ou les générations précédentes ont réussi à bâtir. D’autres essayeront de porter cette entreprise, de leur mieux, comme un sacerdoce, liés par la responsabilité de l’héritage et la loyauté familiale.

Se retrouver à la tête d’une entreprise héritée, qu’il s’agisse d’une Tpe ou d’un grand groupe implique la même responsabilité. Dans un grand groupe, on peut imaginer qu’il y aura suffisamment de collaborateurs pour que l’entreprise continue sa vie malgré le changement à sa tête. Pourtant, sans vision, quelle que soit la taille de la structure, point d’avancement. Cela relève de la posture, pas de l’héritage. Pour certains, elle est innée. Pour d’autres, cela se travaille, tout est question d’état d’esprit.

J’ai un jour été contactée par le co-gérant d’une entreprise familiale héritée. Cette entreprise à deux têtes, deux frères, à 50/50, rencontraient de plus en plus de difficultés. Celui qui m’a appelée cherchait des solutions à l’extérieur. L’autre refusait l’idée de la moindre aide pour ne pas passer pour quelqu’un d’incompétent et de faible. Les parents avaient bâti une entreprise prospère, son orgueil filial l’obligeait à faire au moins aussi bien, seul.

Il est impossible d’aider une entreprise bicéphale qui cherche à avancer de deux façons différentes sans finalement savoir pourquoi ni dans quelle direction.

Ce qui avait été aisé pour les parents avec un environnement économique en croissance, est devenu insurmontable pour les fils quand la situation s’est tendue et qu’il aurait été temps de réinventer leur manière de travailler.

Deux ans après cette demande qui ne pouvait aboutir, j’ai vu que l’entreprise avait fermé. Fin de l’histoire.

C’est toujours triste une fin, surtout une fin comme celle-là, avec ce qu’elle a apporté d’espoirs déçus, de loyauté familiale trahie.

Il aurait suffi que l’un des deux frères change de posture. Accueille l’idée qu’un bon dirigeant se fait toujours aider, de préférence par des personnes plus compétentes que lui dans les domaines qu’il ne maîtrise pas. C’est la seule façon de se remettre en question, d’apprendre, de progresser.

Quand on accepte de diriger une entreprise familiale héritée, la loyauté familiale ne suffit pas pour avoir une vision de chemin à emprunter.

Se retrouver dans cette situation, si l’on accepte la responsabilité de cet héritage, nécessite de cultiver sa posture pour prendre sa place, insuffler de soi-même, insuffler sa vision pour permettre à cette entreprise de continuer à évoluer en harmonie.